[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]Les
Témoins de Jéhovah
pourront s’installer à Monaco
par
RAPHAËL BRUN
Publié le
13 juillet 2017 à 12h05
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Le tribunal suprême de Monaco vient d’annuler la décision administrative du ministre d’Etat refusant de délivrer le récépissé de déclaration de l’association monégasque pour le culte des
Témoins de Jéhovah. Explications.
En Russie, l’association des
Témoins de Jéhovah a été interdite en avril dernier (1). En France, la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) reste extrêmement prudente et réservée par rapport à cette association (lire notre encadré). Alors que, depuis 2011, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) la considère comme une religion. En juillet 2012, la Miviludes réagissait à un arrêt de la CEDH concernant les
Témoins de Jéhovah. En précisant que la décision favorable à cette association prise par la CEDH concernait un « contentieux de nature strictement fiscale ». Et que la Miviludes continuerait « d’exercer sa vigilance à l’égard des
Témoins de Jéhovah, en raison de signalements de dérives sectaires qu’elle reçoit régulièrement de la part d’anciens membres ou de proches des membres de cette communauté. »
« Floue »
À Monaco, le ministre d’Etat, a décidé de s’aligner sur la position de la France. Sollicité par l’association monégasque pour le culte des
Témoins de Jéhovah, il a donc refusé de leur donner un récépissé de déclaration. En cause, « un doute sérieux et légitime quant au caractère sectaire du culte des
Témoins de Jéhovah que ladite association aurait vocation à représenter à Monaco, ainsi qu’aux atteintes à l’ordre public que l’activité déployée par ses membres pourrait générer en Principauté », a indiqué le ministre d’Etat, cité dans un communiqué de presse du tribunal suprême. Une affirmation trop « floue », a répondu le tribunal suprême de Monaco, qui a donc décidé le 30 juin d’annuler cette décision administrative : « Un refus de délivrance du récépissé doit mentionner des faits précis et circonstanciés permettant d’étayer l’affirmation, par le ministre d’État, du caractère illicite des activités de l’association ou des risques d’atteintes à l’ordre public que ces activités pourraient générer. »
« Légalité »
En Principauté, la loi impose aux associations qui souhaitent être dotées d’une personnalité morale de déposer une déclaration auprès du ministre d’Etat. Ce qui les autorise ensuite à embaucher des salariés et à posséder des biens. C’est le récépissé de cette déclaration que le ministre d’Etat a refusé de donner à l’association monégasque pour le culte des
Témoins de Jéhovah. Pour justifier sa décision, le tribunal suprême a souligné que « la liberté d’association bénéficie à Monaco d’une garantie juridique particulièrement forte » et qu’un « refus de délivrance du récépissé de déclaration dûment motivé n’est pas nécessairement légal ».
Arguments
En effet, c’est au tribunal suprême de « vérifier la légalité, en fait et en droit, des motifs mentionnés dans la décision de refus. » Pour sa défense, l’association pour le culte des
Témoins de Jéhovah a invoqué devant le tribunal une série d’illégalités, notamment celui de la violation de liberté des cultes. Une liberté qui est garantie par l’article 23 de la Constitution et par l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme (2). En Principauté, « la liberté d’association bénéficie d’une garantie juridique particulièrement forte », souligne le communiqué du tribunal suprême. Pour interdire une association, il faut donc des arguments précis et sérieux. Dans la mesure où il a épuisé ses recours, le ministre d’Etat doit donc désormais exécuter la décision du tribunal suprême. Si leur requête avait été rejetée à Monaco, les
Témoins de Jéhovah auraient pu lancer un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme. Ils n’auront donc pas à le faire.
1. Le 20 avril 2017, la Cour suprême russe a interdit les
Témoins de Jéhovah, en les qualifiant d’organisation « extrémiste ». La fermeture du siège national de cette organisation, situé près de Saint-Pétersbourg, a aussi été ordonné. Les
Témoins de Jéhovah ont décidé de faire appel devant la Cour européenne des droits de l’homme.
2. Selon l’article 9, « toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ».