Mois de Novembre

Entre la citrouille et le gâteau

e la nécromancie à la voyance, du monde des sorcières à celui d’Halloween, l’homme laissé à lui-même montre combien il est effrayé par la mort. Parce que sa nature lui a communiqué un tant soit peu le sens de la justice et qu’il se sait pécheur, parce que confusément il sent que sa vie ne peut se limiter au monde d’ici-bas, l’homme païen ne peut qu’être effrayé à la simple pensée d’un au-delà qu’aisément il devine maléfique.

Face à ces terreurs revenues au grand galop – au rythme même de la déchristianisation de notre société – la pastorale moderne se veut rassurante. En lieu et place de la citrouille supposée effrayer les frayeurs elles-mêmes, elle propose le gâteau de la Toussaint, afin de célébrer un Dieu d’amour qui pour l’éternité nous veut à ses côtés. Il est certes heureux qu’un prêtre, à l’origine de cette initiative aujourd’hui présente dans plusieurs centaines de boulangeries françaises, rappelle par un geste médiatiquement porteur la volonté salvifique de Dieu. Mais est-ce là pour autant la réponse qu’attend l’homme redevenu païen ? Je ne le crois pas.

Car la question est sérieuse. Ce qui est en jeu, c’est la confrontation entre le mal moral de l’homme et l’infinie justice de Dieu. A cette juste frayeur, on ne peut se contenter d’opposer un simple optimisme béat, fait de crème ou de chocolat. En ce sens, on ne peut que dénoncer cette dramatique pastorale qui a repris à son compte – trop de cérémonies d’enterrement l’attestent – la chanson blasphématoire de Michel Polnareff : On ira tous au paradis. Un tel discours est insultant. Insultant à l’endroit de la justice divine bien sûr, mais également pour l’homme destinataire de ce discours : c’est mépriser sa question, pourtant si profonde.

Il est vrai que la réponse chrétienne est moins savoureuse qu’un délice de boulangerie. Mais elle n’en est que plus belle. Un seul mot la résume : expiation. La prière pour les âmes du Purgatoire, est en ce mois de novembre, la meilleure manière de nous le rappeler. Parce que, dans son amour infini pour nous, le Christ les a expiées sur la Croix, nos fautes morales ne nous destinent pas irrémédiablement aux tréfonds de l’enfer. Parce qu’en cette expiation la justice divine, satisfaite, se double d’une miséricorde qui se donne, la voie de l’éternelle béatitude nous est rouverte. Mais cette voie passe par l’expiation, et en tout premier lieu par celle du Christ devenue nôtre au saint Sacrifice de la Messe, offert en propitiation pour nos péchés. La réponse à l’angoisse moderne n’est pas ailleurs. Occulter cette vérité du saint Sacrifice de la Messe célébré pour les vivants comme pour les défunts, c’est mépriser l’homme moderne et l’enfoncer toujours plus avant dans son paganisme. A cet homme tellement désemparé qu’il semble confier l’apaisement de son angoisse à une pauvre citrouille, ce n’est pas un gâteau qu’il faut proposer : seule la Croix pourra le sauver.
Abbé P. de La Rocque

Les indulgences plénières de novembre

Du 1er au 9 novembre de chaque année, vous pouvez gagner chaque jour une indulgence plénière applicable aux âmes du Purgatoire. Une indulgence plénière est la rémission totale des peines dues au péchés, peines qui précisément retiennent nombre d’âmes au Purgatoire. Par le mérite de vos bonnes œuvres et la miséricorde de l’Eglise, vous pouvez obtenir à 9 âmes (une par jour) la rémission de ces peines, et donc l’accès immédiat à la béatitude éternelle ! Pour cela, il vous faut :

1- Aller visiter un cimetière en y priant ne serait-ce que mentalement pour les défunts (le 1er novembre, la visite d’une église suffit).
2- Communier le jour où vous faites cette visite ; il faut donc communier chaque jour si l’on veut gagner chaque jour une indulgence.
3- Vous confesser dans les huit jours qui précèdent ou qui suivent.
4- Prier aux intentions du Souverain Pontife. Ce qu’on appelle “intentions du Souverain Pontife” recouvre en fait six intentions : l’exaltation de l’Eglise, la propagation de la foi, l’extirpation des hérésies, la conversion des pécheurs, la concorde entre les princes chrétiens, les autres biens du peuple chrétien.

Les âmes du Purgatoire attendent de nous leur soulagement ;
sachons le leur donner, ce seront autant d’âmes qui nous accueilleront au Ciel !

Nos morts

De la commémoraison de tous les fidèles défunts aux célébrations de chaque 11 novembre, les jours à venir nous invitent à vénérer nos morts. Ne serait-ce que d’un point de vue naturel, rien n’est plus légitime que ce culte à l’endroit de ceux qui sont morts droitement. N’est-il pas digne du plus grand respect celui qui, ici-bas, a su véritablement vivre en homme ? Qu’on le veuille ou non, la notion de mérite et de démérite est inscrite au cœur de l’homme, et celui-là qui, par son exemple, a su indiquer la voie droite mérite d’être honoré.

Plus que de simples louanges humaines, ce sont les honneurs divins qu’attend le juste qui repose dans la paix du Christ. Telle est la grande révélation chrétienne : le corps de nos défunts est des plus respectables, car au dernier jour il ressuscitera pour la gloire. « La trompette sonnera. Alors les morts ressusciteront, incorruptibles, et nous, nous seront transformés. Car ce qui est corruptible doit revêtir l’incorruptibilité, et ce qui est mortel doit revêtir l’immortalité » (1 Co 15, 53). C’est enracinée dans cette foi que les chrétiens ont fait du lieu de séjour des morts un “cimetière” – qui signifie “lieu de sommeil” – c’est dans la certitude de cette espérance que la liturgie chrétienne encense la dépouille funèbre, lui rendant ainsi un culte qui n’est dû qu’à Dieu.

L’homme d’honneur comme l’homme de foi se retrouvent donc pour vénérer la dépouille mortelle de ceux qui, dignement, nous ont précédés. Il faudra attendre la société consumériste que nous connaissons aujourd’hui pour refuser de rendre à la terre ceux qui, de leur vivant, y ont mêlé leur sueur ou leur sang, que ce soit par le socle ou par le glaive. A dire vrai, oser “jeter” un corps à l’incinération comme on détruit par le feu nombre d’objets devenus inutiles relève de la plus grande barbarie. Elle enlève à l’homme toute transcendance, qu’elle soit humaine ou chrétienne. Jusque dans la mort, l’homme n’y est considéré que dans sa productivité, et non plus dans la richesse spécifique de son être. Menée à terme, une telle logique ne peut conduire qu’à l’euthanasie : comment une société qui ne respecte plus ses morts ne serait-elle pas tentée de ne plus respecter ses mourants ? Quels que soit les oripeaux de sentimentalité dont cette société – qui risque fort d’être notre France de demain – couvre ses projets de loi, elle ne peut cacher au regard lucide l’état avancé de décomposition qui est sien : elle passe de la barbarie à l’inhumanité !

Il est à craindre qu’une telle société, tellement moribonde qu’il semble impossible de la ramener à la vie, ne soit même plus digne des honneurs de l’ensevelissement. Ne risque-t-elle pas d’attirer sur elle-même non pas les flammes auxquelles elle vouait ses sujets devenus encombrants, mais, pire encore, le feu de la colère de Dieu ?

Abbé P. de La Rocque